lundi 5 février 2007

C'est la fête aux oiseaux

Chapitre 21

C’est la fête aux Oiseaux

Le temps des upercuts et de horions

J’ai jamais vu un truc pareil. T’es élu à not’ maudit machin pour y causer et y dire ce que tu penses, t’es juste élu pour ça, non ? C’est même ça la démocratie, la vraie ? Eh ben chez nous c’est juste le contraire, c’est là que tu la boucles. La baudruche et ses sbires y s’asseoient dessus et décident tout avant, entre eux et toi, t’es là juste pour faire joli, enfin ça dépend qui…j’ai jamais vu plus facho que ce truc là, à croire que Croacroa inspire tout ça, car lui, c’était le pro de la lettre anonyme, c’était la langue de vipère de la délation et le champion de l’upercut, les fauvettes elles en savent quelque chose…Moi je crois que ça va finir comme ça, en échanges d’upercut et de horions collectifs, car à force de nous confiner au mutisme bec cousu, je sens que ça va exploser et que ça va même châtaigner manu militari comme dit l’autre. Moi ce CA j’en ai marre de le voir, y coûte cher aux Oiseaux et y sert à rien, ça vit aux crochets de nos petits moineaux, en plus maintenant il est muet, y cause plus, enfin avant y causait pour dire des conneries, alors peut-être qu’il vaut mieux qu’on l’entende plus. Mais la pie tchatcheuse qui soliloque ça fatigue, ça donne envie de dormir. Elle débloque et c’est tout le temps hors la loi, antidémocratique total ! Gare à toi, y a des limites à ne pas dépasser ou ça va chauffer ! Dans ce maudit machin, les dignes élus de la pseudo-démocratie se radinent deux fois par mois pour faire les beaux, les importants, plumes du jabot gonflées comme qui ? Comme des baudruches ou des grenouilles qui veulent se faire aussi grosses que le bœuf. C’est ça même, ça donne des ordres à ceux qui turbinent, ça se prend pour qui ? Je propose qu’on le supprime le machin, le CA, ça fera pas une vague. Et ça assainira l’atmosphère. Et ça fera des grosses économies. Déjà tu leur supprimes la bouffe y’aura moins d’amateurs, ben chez eux y bouffent bien non, alors pourquoi faut leur payer ? C’est plein vent debout. La révolte a des ailes…ahahah ! C’est parti mon quiqui! Ah ! Qui commence ? Je vois l’œil du serin qui devient rouge sang, mauvais signe, il en a plein les plumes depuis le temps qu’il encaisse des couacs à commencer par ceux de feu Croacroa l’embroché, je vois la mésange qui aiguise son bec bien affuté, les fauvettes qui battent des ailes en cadence, le héron qui gare ses miches dans le couloir doublé sur les bords par sa dinde dodue cherchant refuge dans le nid le plus proche, tandis que Geogeo la touffe en or(dure)en bataille piaille affolée « mais qu’est-ce qui se passe…mais qu’est-ce qui se passe…moi j’comprend rien, j’en ai marre » et que Touchtouch la barriolée se réveille alors qu’atterrit sur son nez les plumes du jabot du cuisinier spécialiste des carottes Vichy, arrachées vigoureusement par une corneille en transes. Piou, piou, piou,piououououou, se lamente le triste corbeau. La pie gendarme voudrait remettre de l’ordre mais personne ne l’écoute, elle finit par recevoir une boulette de pain dur sur le bec. Ca fait mal. Ras le bol. Elle ne sait même pas d’où elle vient. Le serin se prend un coup de bec de la pie tchatcheuse et il réplique en lui balançant quatre coups de pattes griffues qui l’envoient gicler à dix mètres et tous de piailler dans un concert jamais atteint de noms d’oiseaux, l’oie dodue cancane qu’elle veut manger la caille benoîte qui ne disait pas un piou piou plus haut que l’autre mais en voyant l’oie se dandiner vers elle, le surin à la main, elle botte en touche et aplatit l’autre d’un coup d’aile. La grosse pie aux hublots perd ses échasses, elle voit soudain les fauvettes qui lui règlent son compte en lui cassant de rage ses hublots, -ya des arriérés de rage- Coincoin cuicuicui, tilitttilitttilitt, croacroacroa, cararacacacacaracaca. Et le corbeau marron le copain de Croacroa embroché mais toujours prêt à nuire dès qu’il peut, avance, le crime dans l’œil. Qui c’est qui va en prendre ? Heureusement, il s’prend lui une prune bien ajustée qui lui remet la calebasse en place et l’envoie au septième ciel. A dégager, à la casserole ! Le glabre encore sous le choc de sa brûlante rencontre et la main de Satan copier-coller sur sa brosse à reluire voudrait se tirer mais la mésange lui arrache au passage quelques plumes, tandis que les pinsons se jettent sur son plumeau. Que va-t-il lui rester de son plumage, déjà qu’il a pas le ramage ! Nu, le glabre est nu ! Quel spectacle terrifiant ! La pie voleuse au plus fort du massacre cherche sous la table ce qu’elle pourrait voler au cas où… Ca vole bas. Y’a des macchabées sur le pavé. Le corbeau-facteur a pris un tel upercut sur sa citrouille creuse qu’il en oublie son must : insulter l’ennemi. Misère de misère ! Moi je me perche sur les haubans enfin là où je peux, je gare mes plumes, mon bec, mes pattes et ma queue. Et j’y retrouve ô surprise la vieille corneille échevelée qui en a par-dessus la huppe de tous ces pantins et les laisse à leur vacarme éhonté. Pendant qu’ils s’ront à l’hôpital sous perfusion on va tous respirer, au moins ils ne nuiront plus à personne. Heureusement qu’alertés par tout ce tapage le juge vautour et le merle-gendarme gris et sa bande de merles gris arrivent tout plumage déployé afin de remettre de l’ordre dans les rangs, juste à temps pour ramasser la pie voleuse qui avait profité du bazar général pour se remplir les poches avec tout ce qu’elle trouvait. Le juge vautour, les gendarmes gris et les vautours de la tour arborent un air sévère : « tapage nocturne…coups et blessures, échanges d’insultes, upercuts et horions, au poste ». Et d’embarquer tout ce monde de piaillards écharpés se rafraîchir dans l’ombre de la Tour des Vautours où comme vous savez, c’est pas rigolo. Pas rigolo du tout. Tout noir, tout froid, tout triste. On grelotte. Et là pas question de la ramener, de gonfler ses plumes, de jaboter, de cancaner, de pioupiouter, de cuicuiter. Là, la pie tchatcheuse va devoir faire, contrainte et forcée, ce qu’elle obligeait les autres à faire : « tu la boucles cocotte sinon je te transforme en cocotte en papier, ou j’te mets dans la cocotte-minute gronde le Vautour en chef ». Elle a beau se gonfler, dire qu’elle veut pas finir en cocotte en papier, qu’elle veut pas cuire dans la cocotte-minute, qu’elle est la présidente, la reine de la tchatch de supermarché, présidente de quoi ? reine de quoi ? rigolent en cadence les vautours en se tenant les côtes de rire, présidente de qui ? Ici, y’a pas de présidents, y’a que des présidés…hahahahaha ! Yaouh. Ouah ! Heureusement qu’avec les vautours ya une justice et faut voir le juge-vautour assis sur son siège de juge comme il les regarde férocement. Gare aux récalcitrants ! Ca va dinguer ! Glauque ! Je voudrais pas être à leur place, surtout à celle de la vieille pie voleuse qu’il ont pris par les pattes, qu’ils ont vigoureusement secouée comme un vieux tapis poussiéreux pour extraire tout ce qu’elle avait volé et qu’elle cachait dans ses plumes du jabot et sous sa queue. « Moi, j’ai rien volé Monsieur le Juge, moi je suis blanche comme le lait, moi j’ai rien fait, c’est pas moi qui ai volé tout ça c’est ma voisine… » qu’elle disait ; « cause toujours, tu m’intéresses, moi je te connais je t’ai déjà vue ici une première fois, t’es une sale voleuse…récidiviste ! Ton compte est bon ! Au gnouf ! ». Il a fallu que le juge lui mette une pastèque dans le bec jusqu’à ce qu’elle s’en étouffe pour avoir la paix, car elle n’arrêtait pas de jacasser…comme une pie !

Avec le rossignol on s’est garé les plumes vite fait bien fait juste avant la castagne et de là-haut sur les haubans on regardait la casse avec la vieille corneille échevelée qui n’en croyait pas ses yeux et on marquait les points : une rigolade j’vous dis pas, on se croyait dans un western, et pan et paf et boum et bing sur la tronche ! En attendant on chante pour passer le temps et pour nous consoler de la misère des temps…et chantez donc avec nous en attendant que ça passe…ou que ça casse.

C’est la fête aux oiseaux

Le grand vol des pruneaux

Le mano à moineaux

Entre plumes et flingots

Les fau- cons volent haut

C’est la fête aux oiseaux

La rigolade

Tourne à l’aigle

Ils vont toutes grives dehors

N’ont palombe d’un doute

Roulent à corbeau ouvert

Dans un toucan du diable

Habiles comme des manchots

Ils tirent, trucident, dézinguent

Passent les nids au tamis

Mettent les pies au tapis

C’est la fête aux Oiseaux

Le grand vol des pruneaux

Le mano à moineaux

Entre plumes et flingots

Les fau-cons volent haut

C’est la fête aux Oiseaux !

Yaouh ! Ouah !